La danse des macarons

Son rêve était de partir en carrosse. Cependant les cartons de déménagement étaient si nombreux qu’il devenait irréalisable. Elle regardait les caroubes qui jonchaient le sol, tout en se disant que cela nécessiterait un minicar pour tout transbahuter. Elle vérifia pour la Xème fois que rien ne pourrait s’échapper des récipients gris chatertonés. Les cardans du véhicule tiendraient-ils le coup ? 

En attendant le départ, vite un carambar pour se réconforter. Berk ! Berk ! Berk ! Que c’est sucré ! Elle en avait oublié la saveur ! Ca ne valait pas un bon macaron. Elle déglutit en pensant au jus de carotte qu’elle avait oublié de boire ce matin, rite quotidien troublé par l’arrivée en sidecar de son fils qui réclamait sa liberté. Il voulait partir autour du monde avec ses copains. Non ! Elle n’était pas prête à le laisser partir. Elle simula un malaise près de la pancarte qui avait pour information : A vendre !

Comme plombée par des cartouches porteuses de mort dans ce pré carré qui entourait la maison, son cerveau lui lançait en leitmotiv lancinant : plus tard ! Plus tard, on verra ! Pas de discussion maintenant ! Plus tard ! Plus tard !

Pour l’instant, elle avait un rancard avec le représentant de l’agence immobilière qui lui paraissait bien maniaque. De son cartable, il sortait des documents, puis les y remettait. Elle compta qu’il l’avait fait au moins à dix reprises, la dernière fois qu’elle  l’avait rencontré.

Elle reprit son rêve, échappant ainsi à la triste réalité de l’instant. Elle s’imagina dansant la carmagnole, froufroutante dans une robe rouge carmin. Soudain, une sœur carmélite apparut dans son champ de vision, lui tendant un bocal de cardamome. Surprise, elle sursauta, laissant échapper les ingrédients qui se carambolèrent avec les caramboles. Ils gisaient à terre lui évoquant une danse de macarons pistachés.